Violence, criminalisation, et rĂ©solution de conflits dans des contextes dâexploitation des ressources naturelles
L’interface autochtones-secteur de l’extraction
Ce thĂšme de recherche est centrĂ© sur lâincursion des formes contemporaines dâextractions des ressources naturelles dans les territoires autochtones, les communautĂ©s et leurs projets de vie. Conceptuellement, nous pouvons considĂ©rer les processus globaux dâextraction et les sociĂ©tĂ©s autochtones comme deux modes recelant des ontologies, territorialitĂ©s et temporalitĂ©s distinctes, et avec des diffĂ©rences marquĂ©es de positions Ă lâintĂ©rieur de lâĂ©conomie politique au sens large (Cruikshank 2005). Les conflits et la violence (de diffĂ©rents ordres) ou la nĂ©gociation et lâadaptation clĂŽturent la façon dont lâaction rĂ©ciproque se dĂ©ploie entre les modes autochtones et du secteur dâextraction des ressources. Ce thĂšme de recherche cherche ainsi Ă joindre lâĂ©ventail remarquable dâexpĂ©riences de lâĂ©quipe du CICADA pour : [a] mieux comprendre les dynamiques de lâinterface autochtones-secteur de lâextraction; [b] souligner la maniĂšre par laquelle lâextraction des ressources affecte lâĂ©laboration de projets de vie; [c] Ă©tablir des stratĂ©gies pour protĂ©ger les communautĂ©s et les territoires; [d] identifier les sources de pouvoir pour entreprendre de telles actions; et [e] faciliter lâapprentissage croisĂ© entre les membres de lâĂ©quipe de ce programme.
Les diagnostiques locaux et l’action politique
Les travaux dans ce thĂšme de recherche explorent les interfaces politiques, sociales et Ă©conomiques concrĂštes entre les communautĂ©s et le secteur de lâextraction. Deux interfaces seront dâun intĂ©rĂȘt particulier : 1) les diagnostics locaux rĂ©alisĂ©s par les communautĂ©s concernant le contexte et les effets de lâextraction des ressources sur leurs territoires, et 2) les espaces dâaction politique oĂč les communautĂ©s mettent en place des stratĂ©gies pour contrer le « dĂ©veloppement » forcĂ©. Bien que les diagnostics peuvent ĂȘtre perçus, jusquâĂ un certain point, comme prĂ©cĂ©dant les actions et stratĂ©gies dĂ©jĂ en cours, les deux sâalimentent aussi mutuellement. Les projets dans ce thĂšme visent Ă explorer la perception des diffĂ©rentes formes de violence inhĂ©rentes aux lois, Ă la structure de lâĂtat, et la gouvernementalitĂ© des corporations qui façonnent et encadrent les conditions dâextraction Ă diffĂ©rents Ă©chelles. Ils sâharmonisent aussi avec les diverses maniĂšres par lesquelles la gouvernementalitĂ© des corporations se dĂ©ploie dans les zones ciblĂ©es pour lâextraction de ressources Ă travers des stratĂ©gies de « gestion » des relations communautaires et de production de consentement communautaire (Li, 2009; Welker, 2009). Pour leur part, les chercheurs ont dĂ©fini un vocabulaire conceptuel substantiel distinguant entre les formes de violence structurales, symboliques, directes, et autres, qui interviennent dans les contextes dâextraction (Lee Peluso and Watts 2001). Ils ont Ă©galement utilisĂ© les angles de lâanti-politique (Nadasdy 2005), de la gouvernementalitĂ© (Escobar 2008), et la marginalisation Ă©motionnelle (Morales and Harris 2014) dans les contextes de gestion des ressources pour crĂ©er des trames narratives reproduisant des dynamiques dâexclusion (Gregory and Pred 2006; Tyner 2014). Chercheurs, Ă©crivains, et documentaristes prĂ©occupĂ©s par la souffrance sociale (Farmer 2010) identifient les maniĂšres par lesquelles la violence et le racisme intensifiĂ© agissent pour placer les communautĂ©s autochtones dans une position encore plus vulnĂ©rable par rapport aux lois et au maintien social (Tyner 2014). Ce travail rejoint les efforts entrepris pour mettre de lâavant les voix, expĂ©riences et diagnostics de violence locaux dans les discussions concernant lâextraction effrĂ©nĂ©e des ressources (CNCA 2014).
Lâinterface entre les communautĂ©s autochtones et les acteurs et structures liĂ©s Ă lâextraction des ressources naturelles nâest pas seulement diagnostique. Percevoir, nommer et documenter les causes et effets violents des intentions de dĂ©veloppement sâarriment aux rĂ©ponses crĂ©atives des communautĂ©s. Dans des contextes de violence structurelle et de marginalisation, la rĂ©sistance prend souvent la forme dâun rĂ©investissement des lieux de pouvoir. Si la loi, la structure de lâĂtat et la gouvernmentalitĂ© des corporations peuvent ĂȘtre perçues comme des vecteurs de violence, et sont souvent dĂ©crites comme telles, elles sont aussi des sites potentiels pour les actions et les stratĂ©gies (Anaya, 2005). Les poursuites lĂ©gales, les rĂ©appropriations de processus de consultation, les pressions pour renforcer la reddition de comptes, et la participation dans les processus de rĂ©solution des disputes peuvent ĂȘtre des exemples de maniĂšres par lesquelles les communautĂ©s essaient dâagir Ă lâintĂ©rieur du systĂšme dans lâobjectif de remettre en questions des aspects inacceptables, ou la nature inacceptable, de lâextraction des ressources (McGee, 2009; Kirsch, 2014; North, L., Clark, T. D., & Patroni 2006). Ces efforts peuvent rencontrer une opposition substantielle, voire une criminalisation directe (Cunneen 2011; Pedersen 2014).
Notre unicité
La structure de partenaires globaux de recherche de CICADA offre une opportunitĂ© unique pour comparer les apprentissages entre diffĂ©rents contextes. Il sâagit dâune force inhĂ©rente au programme, considĂ©rant le vaste Ă©ventail dâexpĂ©riences que les partenaires autochtones ont eu dans leurs interactions avec les processus dâextraction. Cette diversitĂ© dĂ©coule tant de la variation dans les contextes lĂ©gaux, Ă©tatiques, et dâĂ©conomie politique que de la crĂ©ativitĂ© des rĂ©ponses gĂ©nĂ©rĂ©es Ă lâĂ©chelle locale. Une des dĂ©fis-clĂ©s du programme est de trouver comment encourager les Ă©changes fructueux dâexpĂ©riences et de perspectives. Cela dit, la crĂ©ation dâespaces et de modes dâĂ©changes constructifs peut potentiellement mener Ă des idĂ©es et approches nouvelles face au problĂšme plus large qui est de nĂ©gocier lâinterface entre les autochtones et le secteur de lâextraction des ressources.
Questions de recherche
Les questions qui animent ce thĂšme sont les suivantes :
- Comment les dynamiques engendrĂ©es par le dĂ©veloppement des ressources naturelles influencent-elles l’Ă©laboration des projets de vie autochtones? Cette question peut ĂȘtre envisagĂ©e sous diffĂ©rents angles : comment l’extractivisme sape-t-il ou dĂ©fie-t-il la capacitĂ© des nations et des communautĂ©s autochtones Ă tracer leur avenir? Ou, Ă l’inverse, comment les dĂ©fis posĂ©s par les activitĂ©s extractives dĂ©clenchent-ils des rĂ©ponses ou crĂ©ent-ils des espaces inattendus dans lesquels les projets de vie peuvent ĂȘtre poursuivis?
- Quelles sont les diffĂ©rentes formes de diagnostics communautaires et d’actions sociopolitiques mises en Ă©vidence dans les divers contextes couverts par le CICADA?
- Comment l’interaction entre les modes extractivistes et autochtones s’inscrit-elle dans les autres thĂšmes de recherche du CICADA? Comment l’orientation thĂ©matique et les mĂ©thodologies utilisĂ©es dans un thĂšme de recherche particulier peuvent-elles s’accorder avec les dĂ©fis et les rĂ©ponses gĂ©nĂ©rĂ©s par les activitĂ©s extractives?
Responsables du thĂšme: Martin HĂ©bert, Catherine Nolin, Daviken Studnicki-Gizbert
Contributeurs du thĂšme
José Aylwin
Janelle Baker
Ciaran OâFaircheallaigh
John G. Galaty
Gordon Hickey
Sylvie Poirier
Catherine Potvin
Thierry Rodon
Jon Unruh
Karine Vanthuyne
Projets associés
Autochtones et exploitation miniĂšre au Canada et au Guatemala
Documentation de lâhistoire orale du dĂ©veloppement dans la Comarca NgĂ€be-BuglĂ©, Panama