Atikamekw

Les Atikamekw forment une nation composée d’environ 7 000 personnes, vivant principalement dans trois réserves, à savoir Wemotaci, Manawan et Opitciwan. Leur territoire ancestral, Nitaskinan, est situé parmi les forêts boréales et les bassins versants de la rivière Saint-Maurice dans le centre-nord du Québec. Les Atikamekw étaient un peuple de chasseurs-cueilleurs et ils pratiquent encore régulièrement la chasse, la cueillette et la pêche, même s’ils ont été largement dépossédés de leur territoire et marginalisés par l’État canadien. Les Atikamekw ont également continué à exercer leur système de tenure coutumière, qui est basé sur les territoires des familles élargies. Cela a été menacé par les délimitations administratives et la législation sur la gestion des ressources au Québec, cependant, et la province continue de pratiquer l’exploitation forestière, de louer des terres pour des centres de villégiature et de contrôler les zones de récolte dans le Nitaskinan.

Carte des territoires familiaux
Territoires familiaux du système de tenure coutumière. Source : Sylvie Poirier, Christian Coocoo et Gerald Ottawa – Présentation au colloque du CICADA 2015.
Limites du Nitaskinan
Limites du Nitaskinan. Source : Sylvie Poirier, Christian Coocoo et Gerald Ottawa – Présentation au colloque du CICADA 2015.

Afin de protéger leur culture, leur langue et leur identité, Gerald Ottawa du Conseil de la Nation Atikamekw a expliqué lors du colloque du CICADA de 2015 que les Atikamekw doivent également protéger leur territoire. Les Atikamekw sont actuellement engagés dans des luttes à trois niveaux différents pour gagner l’autonomie et la souveraineté. Premièrement, ils sont impliqués dans des négociations de revendications territoriales avec les gouvernements fédéral et provincial pour faire reconnaître leur territoire traditionnel. Deuxièmement, au niveau régional, ils tentent de convaincre les gouvernements municipaux de réduire la location de leur territoire revendiqué à des personnes non autochtones pour l’utilisation de centres de villégiature. Et troisièmement, dans leurs propres communautés, les Atikamekw sont impliqués dans le projet social et culturel de transmettre les valeurs et les connaissances atikamekw aux jeunes générations. Ils travaillent également à adapter leur système de tenure coutumière aux contraintes actuelles.

Extrait de livre
Sylvie Poirier. « The Atikamekw: Reflections on their Changing World » dans Native Peoples: The Canadian Experience (2013).
« Witamowikok aka wiskat e ki otci pakitina-mokw kitaskino, nama wiskat ki otci atawanano, nama wiskat ki otci mecko-tonenano, name kaie wiskat ki otci pitoc irakonenano kitaskino. (Dites-leur que nous n’avons jamais abandonné notre territoire, dites-leur que nous ne l’avons jamais vendu ou échangé, dites-leur que nous n’avons jamais conclu aucun autre type d’accord concernant notre territoire.) »

—César Néwashish, un Ancien des plus respectés décédé en 1994 à l’âge de 91 ans. (Source : « The Atikamekw: Reflections on their Changing World » dans Native Peoples: The Canadian Experience, 2013).

Sylvie Poirier
Sylvie Poirier Université Laval

L’anthropologue et partenaire académique Sylvie Poirier travaille avec les Atikamekw, explorant les notions de territorialité et de savoir. Poirier cherche à comprendre comment ces concepts affectent le processus de revendications territoriales dans lequel les Atikamekw sont présentement engagés avec le gouvernement fédéral pour avoir des droits sur leur propre territoire. En particulier, Poirier a étudié le projet Atikamekw Kinokewin dont l’objectif est de faciliter la transmission intergénérationnelle du savoir atikamekw. Christian Coocoo du Conseil de la Nation Atikamekw a identifié trois défis à la transmission des connaissances : 1) la création de réserves ; 2) les pensionnats ; et 3) le penchant des jeunes pour les médias sociaux.

Page de livre
Sylvie Poirier. « The Atikamekw: Reflections on their Changing World » dans Native Peoples: The Canadian Experience (2013).
« Les territoires familiaux atikamekw en tant qu’espaces postcoloniaux sont ainsi devenus les terrains de coexistence complexe, de négociations et d’enchevêtrements entre les régimes de valeurs autochtones et non autochtones, les systèmes de tenure foncière, les formes de gouvernance et les conceptions des terres forestières et de ses habitants non humains. »

—Sylvie Poirier, Présentation au colloque du CICADA 2015 PPT

Ces défis à la transmission des connaissances sont ceux que les Atikamekw tentent de surmonter. Malgré toutes leurs luttes avec l’État, les Atikamekw ont continué à pratiquer leurs activités traditionnelles. En effet, ils pratiquent 233 activités traditionnelles sur leur territoire pendant les six saisons atikamekw. L’objectif des activités traditionnelles est que les familles gagnent et maintiennent l’autosuffisance, tout en assurant la continuité de la flore et de la faune sur leur territoire. Afin de protéger leurs ressources, les Atikamekw ont des chefs territoriaux qui connaissent les tenants et aboutissants de leur territoire, y compris toutes les ressources, et qui décident comment les ressources doivent être utilisées.

« Qu’est-ce que la base territoriale? C’est la connaissance écologique traditionnelle de nos aînés atikamekws. C’est à partir de cet élément de base que le travail d’élaboration du code de pratique, la planification sur l’occupation et contrôle territorial, la planification sur le prélèvement des ressources naturelles, la protection territoriale et l’aménagement forestier devra être développé. »

—Gerald Ottawa, Colloque du CICADA 2015

EN SAVOIR PLUS

Projets associés

Territorialités autochtones postcoloniales, transmission culturelle et autonomie : la Nation Atikamekw et l’univers forestier