Innu - Nitassinan (région orientale de la péninsule du Labrador), Québec et Labrador
Les Innus sont un peuple algonquien dont le territoire, traditionnellement connu sous le nom de Nitassinan, est situé au Québec et au Labrador. Le CICADA est affilié à trois communautés innues au Québec : Montagnais de Nutashkuan, située à l’embouchure de la rivière Natashquan sur la côte nord du golfe du Saint-Laurent ; Première nation des Pekuakamiulnuatsh (Mashteuiatsh) dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean ; et Première nation des Innus Essipit sur la côte nord du golfe du Saint-Laurent.
Passerelle sur le territoire de la réserve de Mashteuiatsh, le long du Lac Saint-Jean. Source : Paul-Antoine Cardin, 2016.
Lors de sa présentation au colloque du CICADA de 2015, Hélène Boivin, coordonnatrice des relations gouvernementales pour Mashteuiatsh et partenaire du CICADA, visait à répondre à la question suivante : « Quel est le fruit du travail fourni pour régler les questions relatives aux droits territoriaux, d’accès aux ressources naturelles, à l’autonomie et au développement des Premières nations innues de Mashteuiatsh, Essipit et Nutashkuan ? » Ces trois communautés innues, qui ont ensemble formé le Conseil tribal Mamuitun mak Nutashkuan, sont impliquées dans un processus de revendications territoriales depuis plus de 35 ans, ce qui leur a fait accumuler une dette de 42 millions de dollars. Le traité qu’ils tentent de finaliser représente 8 000 personnes, qui constituent environ la moitié de la population innue de 16 000 au Québec. En 2004, ces communautés ont signé l’Entente de principe d’ordre général avec les gouvernements du Québec et du Canada. Le Conseil tribal de Mamuitun espérait avoir un traité finalisé d’ici décembre 2016, bien que malheureusement cela ne se soit pas encore concrétisé.
Ces Premières Nations innues ouvrent la voie à une nouvelle génération de traités. Si ce traité est finalisé, ce sera le premier traité au Canada qui est établi sur la base de la reconnaissance des droits des Innus, plutôt que sur l’extinction ou l’abandon de ces droits. Ce serait également le premier traité signé au Québec depuis la Convention de la Baie-James et du Nord québécois de 1975 avec les Eeyouch (Cris de la Baie James).
Au cours de ce processus de revendications territoriales, les Innus en sont venus à considérer leur traité métaphoriquement comme un bébé :
Colonne vertébrale (chapitres 1 et 2) : leur stratégie juridique pour la reconnaissance (et non l’extinction) de leurs droits.
Cœur (chapitres 3, 4 et 5) : patrimoine innu, activités traditionnelles et territoire.
Jambes (chapitre 6) : leur participation à la prise de décisions concernant les projets de développement et d’extraction de ressources sur leur territoire ancestral avec le gouvernement du Canada, sur une base de nation à nation.
Pieds (chapitre 7) : leurs droits ancestraux et titre autochtone, ainsi que leur plan économique, qui comprend la recherche d’une compensation pour l’utilisation de leur territoire et de leurs ressources.
Tête (chapitre 8) : l’établissement d’une autorité gouvernementale innue avec une constitution.
Bras et mains (chapitres 10 et 11) : l’argent et le financement nécessaires pour poursuivre diverses activités.
L’épine dans un pied, le caillou dans une chaussure (un défi) (chapitre 12) : la taxation, qui sera l’une des entreprises les plus importantes du groupe de traité innu et fournira une source de revenus indépendants.
Orteils (chapitre 13) : le développement économique, qui sera stimulé par l’accès aux ressources hydroélectriques et l’expansion de l’ethno-tourisme, entre autres activités.
Doigts (chapitre 14) : le partage des redevances, car il y a trois communautés innues vivant sur ce territoire, ainsi que des personnes non autochtones.
Oreilles et bouche (chapitres 15 et 16) : les oreilles sont pour pouvoir entendre les oiseaux chanter et la bouche est pour pouvoir manger du poisson.
Poumons (chapitre 17) : les Innus prévoient avoir trois parcs de conservation sur leur territoire, ainsi que 11 sites patrimoniaux.
Organes reproducteurs (chapitre 18) : décider quels critères d’admission et d’inscription on doit remplir pour être accepté comme membre d’une Première Nation innue.
Foie, reins et intestins (chapitres 19 et 20) : le processus de mise en œuvre du traité, qui est extrêmement important, car l’autonomie, le partage, etc. ne seront pas des résultats immédiats ou automatiques du traité.
Peau et système circulatoire (chapitres 21, 22 et 23) : établissement de règles qui permettent de toujours revisiter les principes du traité, si nécessaire.
Hélène a expliqué lors du colloque de 2015 que sa raison de présenter le projet de traité du Conseil tribal Mamuitun est d’essayer de s’assurer qu’ils ont le soutien du grand public en entrant dans les étapes finales de leur processus de revendications territoriales. Le processus de production et de signature de l’Entente de principe a été extrêmement difficile, car il y avait de nombreuses idées fausses entourant les Premières Nations innues et le processus de traité. Ce traité à venir est extrêmement important pour les Innus. Comme l’a dit Hélène : « Nous, notre Première nation, on est rendu à un point où nous, l’être humain, c’est le premier élément qui doit être protégé dans la biodiversité, parce qu’on est plus ou moins à courte échéance menacé de disparition comme peuple. »